Retour de lecture

Ce que j’en pense : Trouilleville

Alors que je flânais sur le site des Imaginales1, cherchant à respirer un air plus frais que celui de la Bulle du Livre et entre deux poignées de mains, je suis tombé sur un bouquin qui m’a tout de suite tiré l’œil : Trouilleville Livre 1 : La Silencieuse, Le Jeu de Rôle pour les Enfants. Ca m’avait tout l’air d’être un chouette bouquin pour mes monstres, et le fait qu’il soit complètement passé sous mon radar à nouveautés m’a un tantinet vexé (comment ça, un jdr pour les enfants qui sort sans que je ne le sache !?!).
Je me suis donc empressé d’augmenter mon découvert et l’ai soigneusement rangé dans mon escarcelle avec d’autres folies, avant de rejoindre mon stand pour y vanter les mérites de la SFFF Suisse.
Post festival, une fois que j’eus réintégré mes pénates, je me suis plongé dans le Livre 1, et après avoir fouillé le site de l’éditeur pour assouvir ma curiosité , me suis empressé de commander le suivant : Trouilleville : Le Marais de Clairbrun (étrangement pas annoté Livre 2), tant ma lecture m’avait enthousiasmé.
Alors, Trouilleville, qu’est-ce que c’est ?

Hé bien, c’est un jeu de rôle créé et illustré par Johan Troïanowski2, notamment auteur de bd pour enfants (mais pas que), poète, bloggeur… et édité chez Makaka Editions3, qui avaient auparavant déjà sortis quelques albums du Monsieur.
C’est un jeu à destination des enfants (comme le dit si bien le sous-titre), dans lequel ils incarneront des petits monstres habitant une grande forêt (La Silencieuse), et plus précisément Trouilleville, le city-metierre (pardon) où tout cet écosystème monstrueux (vampires, sorcières, épouvantails, profonds, momies, loups-garous et autres savants fous) a trouvé refuge.


La Forme :

Livre en 18,5x27cm à couverture dure de 98 pages, tout couleur sur papier mat d’une épaisseur très confortable, qui ouvre par une belle carte de la Silencieuse et se termine par la Feuille de perso vierge.


Les textes en couverture bénéficient d’un vernis sélectif du plus bel effet et les différents cahiers (cousus) sont collés ensemble sur le dos du livre. Bref, c’est du solide et pourra être manipulé à loisir sans grands risques de dégradations.
Le livre est rempli d’illustrations (seules les pages 33 et 45 n’en bénéficient pas) et la mise en page est bien aérée, utilisant des codes de couleurs pour augmenter la lisibilité de la chose.
Ca démarre sur un sommaire reprenant les différentes parties du livres, à savoir :
– Chapitre 1 : L’invasion des bûcherons, une aventure dont vous êtes l’héroïne (12 pages)
– Chapitre 2 : Les monstres (25 pages)
– Chapitre 3 : Les règles du jeu (6 pages)
– Chapitre 4 : Le monde de Trouilleville (21 pages)
– Chapitre 5 : Aventure 1 Fracas chez Baba Yaga (16 pages)
Par là-dessus, nous ajouterons une double page de BD expliquant ce qu’est une partie de Trouilleville et 10 pages de prétirés (5 personnages) en fin d’ouvrage.

Et tout ça Mesdames et Messieurs pour la modique somme de 25€ tout pile, non non vous ne rêvez pas !

Le Fond :

La nécropole qui donne son nom au jeu est baptisée, comme vous l’aurez compris Trouilleville.
Elle est sise au fin fond d’une vaste forêt à laquelle les humains ont donné bien des noms au fil des années, mais que nous retiendront simplement sous l’appellation La Silencieuse.
Depuis des siècles, des monstres errants trouvent refuge au sein de Trouilleville, qui leur fournit un abris, un lieu de vie accueillant, où ils peuvent enfin cesser d’être pourchassés et mener une existence paisible.
Les personnages qu’interprèteront les joueurs seront donc de jeunes monstres qui vont évoluer et grandir dans cette société.
Le premier volume de Trouilleville propose de jouer des Golems, des Profonds, des Savants Fous, des Sorcières ou des Vampires. Ce choix sera étoffé dans le deuxième livre, avec l’ajout des Epouvantails, des Fantômes, des Loups-garous, des Momies et enfin, des Squelettes, portant le choix de personnages à 10 familles de monstres (elles-mêmes proposant à chaque fois plusieurs variations), ce qui s’avère plutôt confortable, nul doute que chacun pourra y trouver son bonheur.


Comme l’indique le sous-titre du bouquin, Trouilleville est un jeu pour les enfants, emprunt d’une certaine naïveté fort bienvenue, et tout ce petit monde vit en harmonie dans la grande forêt.
Dès le démarrage du livre, la Fossoyeuse (le terme utilisé pour référer à la Maitresse ou au Maitre de jeu) est prise par la main au travers d’une aventure dont elle sera l’héroïne qui servira à poser les grands principes des règles (caractéristiques, équipement, atouts et sortilèges, résolution des actions…).


Cette aventure pourra être reprise telle quelle avec un groupe de Joueurs (le terme utilisé pour référer aux joueuses et joueurs de Trouilleville) afin de démarrer rapidement le jeu et propose d’enquêter sur un groupe de bûcherons humains qui ont entrepris récemment de déboiser l’orée de la forêt.
Libre à vous de les effrayer, discuter avec eux (à vos risques et périls) ou trouver toute autre solution afin de préserver la forêt de ce qui pourrait s’avérer une menace pour la tranquillité de nos petits monstres.
Plus qu’une grande trame générale dans l’histoire, Trouilleville va vous proposer d’explorer la Silencieuse et ses bizarreries, à commencer par Trouilleville elle-même, avec ses différents quartier, tous décrits et accompagnés de propositions d’aventures thématiques en fonction de leurs habitants.

Mais qu’est-ce que j’adore les cartes

Le fond du jeu repose donc sur le fait d’interpréter de jeunes monstres qui vont découvrir leur environnement (fantastique), grandir, apprendre à devenir effrayants et protéger Trouilleville du monde extérieur, voire des habitants de Trouilleville elle-même… car même plein de bonnes intentions, un accident est vite arrivé.

Les Règles :

S’adressant à des enfants, Trouilleville nous propose des règles simples et on ne peut plus rapides à prendre en main.
Les petits monstres vont être principalement définis par trois caractéristiques : Corps, Esprit et Frayeur
Lors de la création des personnages, les monstres disposent de 6 points à répartir dans leurs Caractéristiques (ce qui nous donne donc des scores de départ compris entre 1 et 4), 3 Atouts (ou 3 Sortilèges pour les Sorcières), 3 Objets, une Peur, une Faiblesse, et les Points de Santé varieront selon les Familles de monstres ( 3 ou 4 points) .
Pour résoudre une action, la Fossoyeuse va regarder quelle caractéristique correspond le mieux à l’action que le monstre veut entreprendre, et le score de celle-ci indiquera le nombre de dés 6 à lancer.
Sur des résultats de 5 ou 6, le dé affiche un succès, et le nombre de succès pour réussir une action dépendra de la difficulté de celle-ci.

Voici une fiche de perso bien lisible


Tout ça, c’est la base.
Là-dessus, nos monstres vont pouvoir utiliser leurs Objets, leurs Atouts (ou Sortilèges) et de bonnes idées (ou pas) pour étoffer leur pool de dés.
Chaque utilisation jugée pertinente par la Fossoyeuse confèrera un dé supplémentaire à la résolution de l’action, augmentant ainsi les chances d’obtenir des succès.
Et voilà.
Simple, efficace et qui encourage la créativité des plus jeunes pour réagir aux différentes situations avec les moyens du bord.


Pour ce qui concerne les conflits, Trouilleville n’est pas un jeu qui envisage la mort des personnages, et étant donné le ton du jeu, c’est tant mieux.
Nos petits monstres pourront ainsi être amenés à subir différents états (sonné, empoisonné, malade, hypnotisé, maudit, bénit…), chacun ayant ses conséquences propres.
Le plus courant sera Sonné, quand un monstre voit sa réserve de Santé réduite à zéro et qu’il ne peut par conséquent plus agir dans la scène.
Concernant la progression, on reste dans la simplicité et chaque aventure jouée permettra de gagner un niveau, jusqu’à concurrence de 10.
A chaque montée de niveau, les monstres auront le choix parmis 5 options :
– augmenter la valeur de Corps de 1 point (rouge)
– augmenter la valeur d’Esprit de 1 point (bleu)
– augmenter la valeur de Frayeur de 1 point (vert)
– augmenter la valeur de Santé de 1 point (vert pâle)
– gagner un nouvel Atout/Sortilège (pour les Sorcières)/Invention (pour les Savants Fous) (gris)
Chaque option ne peut être choisie que 3 fois au cours d’une carrière de monstre et pour s’y retrouver, il suffit d’entourer chaque niveau passé de la couleur de l’option retenue.
Lorsque l’on arrive niveau 10, on considère que le petit monstre a bien grandi, et est devenu suffisamment effrayant pour ne plus avoir grand chose à apprendre de ses aventures, ce qui est tout à fait raccord avec un jeu faisant le choix de s’axer sur l’enfance et les apprentissages.

Qu’il est mimi ce Dagon

Ce que j’en pense :

Bon, sans trop de surprise, j’ai adoré la lecture de Trouilleville. Je trouve que tout y est bien agencé et cohérent. Le style d’illustration sert le propos, la mise en page est claire et efficace et tout est ici fait pour que la prise en main soit le plus simple possible pour tout le monde.
Ce jeu est clairement pensé pour des enfants, selon moi en tant que joueurs à partir de 6 ou 7 ans et comme Fossoyeuse à partir de 10-11 ans.
L’aventure dont on est le héros en début d’ouvrage permet de prendre directement contact avec le contenu d’une partie de jeu de rôle, posant des enjeux qui pourront être réutilisés plus tard au fil des parties, comme une trame de fond sur les différentes propositions développées ensuite.
Pour ce qui est des aventures justement, ce livre de base n’en est pas avare, puisque nous avons donc la première en début d’ouvrage, toutes les propositions (certes légères, mais amplement suffisantes pour mettre un mj « confirmé » en position de créer de belles choses avec ses joueurs) qui accompagnent la description des différents quartiers de Trouilleville et pour conclure, le « grand » scénario Fracas chez Baba Yaga, qui va mettre le pied à l’étrier d’un groupe de personnages en les posant d’emblée en sauveurs de Trouilleville.


Le scénar est découpé en trois parties qui peuvent être jouées dans n’importe quel ordre et va permettre à nos petits monstres de découvrir différents endroits de la Silencieuse (comme Le marais de Clairbrun), et que ce n’est pas parce que l’on est soi-même un monstre que les autres créatures seront forcément aimable avec nous.
Pour ce qui est du deuxième volume (donc Le marais de Clairbrun), il est focalisé sur cette région particulière de la Silencieuse, propose 5 nouvelles familles de monstres jouables, des outils pour développer soi-même des scénarios (tableaux de création à la volée) et deux grandes aventures supplémentaires, pour un format et une pagination identique à Trouilleville.


J’apprécie tout particulièrement la clarté avec laquelle tout est présenté dans ce livre.
Pas un point de règle ne nécessite d’être relu plusieurs fois pour être compris, on va à l’essentiel également dans la présentation de l’univers, avec suffisamment de détails pour le rendre vivant, sans tomber dans le verbiage inutile.
Beaucoup d’ouvrages de Jdr devraient à mon sens s’inspirer de ce modèle afin de remettre en avant l’aspect jeu, avec des choses exploitables concrètement, plutôt que de chercher à tout prix à noircir des pages et des pages de texte.


Donc voilà, je suis fan de Trouilleville, suis conquis à la fois par le traitement du livre et la proposition du jeu.
Les illustrations sont en parfaite adéquation avec le propos et je me surprend à avoir envie de lire en bd le développement de cet univers (je crois les doigts pour que l’auteur ait le même genre d’envie de son côté).
Gros coup de cœur donc, et une fois que je l’aurai fait jouer à mes enfants, je tenterai de faire un retour de partie.

Je suis sous le charme


Un entretien avec Johan Troïanowski suivra très prochainement (forcément, je ne pouvais pas passer à côté), ainsi qu’un retour plus concret sur Le marais de Clairbrun… D’ici là, je vous encourage fortement à vous pencher sur le jeu pour vous faire votre idée, surtout si comme moi vous avez déjà des petits monstres à la maison à occuper pendant les vacances.
Très belle surprise de cette année, comme quoi, même en se tenant informé de ce qui sort, les propositions sont tellement nombreuses que l’on rate forcément de belles choses… mais hop, retard rattrapé.

Retour de lecture rédigé par David BARTHELEMY pour Culture Jdr

Notes et Références :
1 Imaginales
2 Johan Troïanowski
3 Makaka Editions